Nos coups de coeur

L’émergence du monde ouvrier en Suisse au XIXe s.
Laurence Marti

Ce que nous vous demandons ce sont les moyens de vivre honorablement, d’élever nous-mêmes nos familles, et de sortir peu à peu de cet état d’infériorité où vous vous complaisez à nous laisser depuis tant de siècles !  » Cette requête aux dirigeants helvétiques signée par Marc Aviolat, ouvrier typographe dans les années 1860, témoigne des changements que connaît l’univers du travail durant la première moitié du XIXe siècle. Reléguée jusque-là aux marges de la société, la population ouvrière va dès lors prendre place au coeur des réflexions et des préoccupations. Comment a-t-elle pu parvenir à une telle centralité, au point même de se voir doter de la capacité d’influencer la marche du monde ? Cette question constitue la trame de cet ouvrage. Libre accès au travail, renforcement de l’industrialisation, extension du salariat, modifications dans la définition des métiers, dans les modes de vie et dans les représentations sont quelques-uns des aspects passés en revue au fil des chapitres et qui ont contribué à faire apparaître et exister le monde ouvrier. Entre regard sociologique et analyse historique, cette synthèse se distingue de l’histoire ouvrière « classique », centrée sur le développement du mouvement ouvrier, pour s’orienter vers des réflexions plus larges, sur les processus et les conditions d’émergence et de reconnaissance d’une catégorie sociale au sein de la société helvétique du XIXe siècle.


L’Institut
Stephen King

Au coeur de la nuit, à Minneapolis, des intrus pénètrent la maison de Luke Ellis, jeune surdoué de 12 ans, tuent ses parents et le kidnappent.
Luke se réveille à l’Institut, dans une chambre presque semblable à la sienne, sauf qu’elle n’a pas de fenêtre. Dans le couloir, d’autres portes cachent d’autres enfants, dotés comme lui de pouvoirs psychiques.
Que font-ils là ? Qu’attend-on d’eux ? Et pourquoi aucun de ces enfants ne cherche-t-il à s’enfuir ?
Aussi angoissant que Charlie, d’une puissance d’évocation égale à Ça, L’Institut nous entraîne dans un monde totalitaire… qui ressemble étrangement au nôtre. Le nouveau chef-d’oeuvre de Stephen King.


Thérapie de groupe [BD adultes]
Manu Larcenet

Thérapie de Groupe » met en scène de façon éblouissante un auteur de bande dessinée à la recherche de l’inspiration. Dans une quête inlassable il parcourt l’univers de la création. Il remonte l’Histoire, fait appel aux plus grands peintres, interpelle Boileau, Nietzsche ou Dieu Lui-même.
Faire rimer humour et désarroi n’est pas à la portée de tous les poètes. Avec cet album drôle et émouvant, cultivé et percutant, c’est pourtant l’exploit que réalise l’auteur.
Ce voyage aux sources de la création est l’occasion pour le lecteur de constater l’extraordinaire talent graphique de Larcenet et l’ampleur de sa palette. Mais aussi d’entrevoir la douleur d’un artiste se cognant aux murs de l’incompréhension et de la solitude. Au bout du voyage, à chaque fois, l’impasse de la souffrance.
Avec une lucidité féroce, l’auteur ne s’épargne jamais et dépeint de façon poignante un artiste à la dérive. Sauf que cet artiste, Manu Larcenet, est aussi le maître de l’autodérision. Et qu’il réussit à rendre chaque dessin, chaque page, chaque échec, aussi hilarants que bouleversants.
Face à l’angoisse de la création, sans artifice ni dissimulation, il se met à nu dans une exploration d’une richesse et d’une profondeur rare et d’une vérité souvent déchirante. Et d’une drôlerie surprenante.
Dialogues ciselés, mise en scène au cordeau, dessin incroyablement abouti, le dernier avatar d’une oeuvre originale et dense, « Thérapie de Groupe » enchantera évidemment la cohorte des fidèles de Larcenet. Et sera un vrai choc pour ceux qui le découvrent.
Source: Dargaud, éditeur


Edward Gorey une anthologie [BD adultes]
Edward Gorey

Le meilleur d’Edward Gorey en un seul livre ! Cinq albums majeurs du maître de Tim Burton, dont le cultissime Les Enfants fichus.
Edward Gorey (1925-2000) fut sans doute l’écrivain-dessinateur le plus original du siècle dernier. Du début des années 1950 jusqu’à la fin des années 1990, sous son nom ou sous des pseudonymes transparents (Ogdred Weary, Eduard Blutig, D. Awdrey-Gore, Edward Pig, Madame Groeda Weyrd…), il a conçu une centaine de recueils inhabituels mêlant textes et images. De The Unstrung Harp (1953) à The Headless Bust (1999), ces œuvres se composent d’une myriade d’histoires aux titres étranges, aux dessins minutieux, aux phrases elliptiques, où se mêlent les ingrédients les plus improbables : la somptuosité du gothique et la rigueur de l’absurde, le mystère des romans policiers et la poésie des haikus, l’élégance des intérieurs victoriens et la simplicité du clair-obscur, l’esprit du surréalisme et le goût du fantastique, les destins tragiques et les vies légères, les chiens philosophes et les urnes métaphysiques, les chats cabots et les danseuses de ballets mélancoliques, les abécédaires et les secrets, les monstres sympathiques et les enfants perdus…
Une anthologie rassemble les albums suivants : L’Enfant Guigne ; Les Enfants fichus ; L’Aile ouest ; Total Zoo ; Le Couple détestable
Source Éditeur


Payer la terre [BD adultes]
Joe Sacco

Joe Sacco, qui n’avait plus réalisé de bande dessinée documentaire depuisGaza 1956 en 2010, revient à ce genre qu’il a popularisé.
Avec Payer la terre, il nous entraine dans les Territoires du Nord-Ouest au Canada, une région grande comme la France et l’Espagne réunis, mais peuplé de seulement 45 000 habitants.
Allant à la rencontre des autochtones, il nous retrace l’histoire de ce pays depuis l’arrivée des premiers colons et en dresse un portrait terrible, tant économique qu’écologique qu’humain. En 2015, Joe Sacco s’est rendu par deux fois dans les territoires du Nord-Ouest du Canada, au dessous de l’Arctique. Il est allé à la rencontre des Denes, un peuple autochtone. L’auteur nous raconte l’histoire de ce peuple, ses traditions, restées intactes pour certaines, les premières rencontres avec les anglais.
Pendant longtemps les peuples indigènes du Grand Nord, vivant sur des terres non propices à la colonisation agricole, restèrent livrés à eux-mêmes, jusqu’à ce que la découverte de pétrole et d’or incite le gouvernement à officialiser son autorité sur eux, comme sur leurs terres. À cette période, les autorités s’appropriaient les territoires, non plus par les massacres, mais cliniquement, méthodiquement, et de façon administrative – grâce à des traités.
En lisant ceux-ci, on n’échappe pas à l’impression que les « Indiens » ont donné la terre où ils vivaient en échange de la promesse d’une annuité de quelques dollars, de quelques outils et de médailles pour ceux qui se disaient leurs chefs. Aujourd’hui, la fracturation hydraulique ajoute la pollution à la spoliation initiale.
Source Futuropolis, éditeur


Il est où le bonheur?
François Ruffin

« Nous sommes tous sur la même planète, tous sur le même bateau. » Le mardi 23 juillet dernier, Greta Thunberg et ses jeunes amis visitaient l’Assemblée nationale. « La bataille pour le climat, nous la gagnerons tous ensemble ! »
Ah bon, vraiment ?
Voilà que cet impératif, sauver la planète, nous rassemblerait tous ? Riches et pauvres ? Damnés de la Terre et actionnaires ? Tous unis contre la catastrophe en cours ? Voilà que ce nouveau spectre, le réchauffement, éteindrait « la guerre des classes » ? Au contraire, me semble-t-il.
Au contraire : la crise écologique aiguise cette lutte, la renforce. La « guerre » ne porte plus seulement sur le niveau de vie, mais sur la vie elle-même. Nous sommes engagés dans un combat, des « Terriens » contre des « forces destructrices », de l’intérêt général contre les multinationales. Nous avons des adversaires, et ils sont organisés, avec des bataillons d’avocats, de lobbies, d’éditorialistes, d’élus, jusqu’au sommet des Etats.
S’éclairant « à la lumière de Jaurès », François Ruffin rouvre un chemin pour la gauche. Avec cette question au cœur : comment muer le plomb de l’angoisse en or de l’espérance ? Il est où, désormais, le bonheur, et le progrès, et le sens de l’existence, par temps d’effondrement ?
Source Editeur


Briser en nous la mer gelée
Erik Orsenna

«Voici l’histoire d’un amour fou. 
Et voici une lettre, une longue lettre envoyée à Madame la Juge, Vice-Présidente aux affaires familiales. 
En nous divorçant, Suzanne et moi, le 10 octobre 2011, elle a soupiré : « Dommage, je sentais beaucoup d’amour en vous. »  Comme elle avait raison! 
Mais pour nous retrouver, pour briser en nous la mer gelée, il nous aura fallu voyager. 
Loin en nous-mêmes, pour apprendre à ne plus trembler. 
Et loin sur la planète, jusqu’au Grand Nord, vers des territoires d’espions d’autant plus invisibles que vêtus de blanc, dans la patrie des vieux chercheurs d’or et des trésors perdus, refuge des loutres de mer, des libraires slavophiles et des isbas oubliées. 
Le saviez-vous ? Tout est Géographie. 
Qu’est-ce qu’un détroit, par exemple le détroit de Béring ? Un bras de mer resserré entre deux continents.  À l’image exacte de l’amour. 
Et c’est là, entre deux îles, l’une américaine et l’autre russe, c’est là que court la ligne de changement de date. 

Après L’Exposition coloniale, après Longtemps, l’heure était revenue pour moi de m’embarquer pour la seule exploration qui vaille : aimer.» Erik Orsenna.
Source Editeur